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La photographe Julia Sinka se spécialise dans les thèmes de la nature, de l'humain et de leurs dimensions corporelles. Ses photos s'attachent aux formes suggérées par le mouvement, qu'il s'agisse du creux du cou d'une femme se dressant sur la pointe des pieds ou de la courbe humble d'une tige de fleur sous de lourds pétales mûrs. Si les œuvres de Sinka affichent une picturalité presque transcendante, détachée du réel, elles possèdent en même temps une sensualité terrestre – une sensualité capable, à l'instant de l'observation, d'éveiller presque tous les sens humains. Sinka a également créé une série de photographies pour Etíde Botanicals qui incarne la nature sensuelle, légèrement magique et sensorielle de la marque.

Procrastination et connexion à la créativité
Tout ce dont j'ai besoin pour me mettre dans l'ambiance d'une journée créative, c'est d'un environnement de travail organisé. S'il s'agit d'une journée consacrée à mon travail, une table propre et ordonnée me permet de me connecter rapidement et facilement au processus en cours et de me mettre au travail sur une mission pour un client. En revanche, si c'est une journée créative consacrée à la recherche, à l'exploration ou au développement d'une idée, le démarrage peut prendre plus de temps. Cela peut aussi commencer par une période de procrastination plus longue, durant laquelle je ne fais que me vider l'esprit et m'abandonner à mes émotions.

En silence. Seul
Le bruit et l'agitation domestique sont des distractions extérieures qui perturbent mon flux créatif. Je ne peux pas travailler avec d'autres personnes et je n'ai pas besoin de musique. Le silence et la solitude sont mes conditions de travail idéales. Parfois, cependant, j'aime mettre de la musique juste pour voir où elle me mène. Je le fais lorsque je n'en ressens pas l'impulsion ou que je n'arrive pas à m'y retrouver dans beaucoup de matière. L'ambiance de la musique peut, par exemple, évoquer des expressions visuelles plus agressives.

Activités tactiles dans les cours d'Āgenskalns
Les sensations tactiles me connectent beaucoup plus rapidement au flux créatif. Ensuite, je sors pour être en contact direct avec la nature. J'ai besoin d'observer et de toucher les plantes et les fleurs, de ressentir leurs surfaces, leurs textures et leurs formes. Les cours de nombreuses maisons du quartier d'Āgenskalns à Riga regorgent de fleurs des prés semées naturellement et de simples massifs de fleurs. Et c'est précisément ce contraste – la présence de la nature en ville – qui est si inspirant ! C'est le miracle du regard et de l'observation. D'ailleurs, en me promenant dans ces cours, j'ai un peu l'impression de faire quelque chose d'interdit… Mais je sais que je ne suis pas la seule. Des fleuristes professionnels sillonnent aussi les espaces verts de la ville à la recherche de brindilles et de branches décoratives.

Sentimentalité, phlox et souvenirs comme lieu sûr
Mon travail est avant tout un processus personnel. Qu'il s'agisse de photographier des fleurs ou autre chose, c'est une quête personnelle, mais cela implique aussi de s'intéresser aux réactions des autres et de les observer. L'expérience humaine est extrêmement subjective. Le regard d'une personne sur une chose peut être très différent de celui d'une autre.

Par exemple, j'associe la nature au jardin de ma grand-mère et aux étés de mon enfance qui, je l'avoue, m'étaient quelque peu imposés à l'époque. Les fleurs des massifs me semblaient si évidentes – j'en trouvais même certaines laides – et la floraison des asters me rappelait le retour à l'école. Mais la sentimentalité me ramène aujourd'hui aux phlox, aux tulipes rouges et à ces mêmes asters… Mes souvenirs de ces fleurs sont peut-être négatifs, mais leur présence me semble un refuge. Et à travers mon travail, je souhaite montrer ce que j'ai trouvé de beau dans cette expérience.

Qu'il s'agisse d'une photo ou de vraies fleurs, elles évoquent quelque chose en chacun. Une personne extravertie comme une personne très réservée peuvent toutes deux réagir fortement à une photo romantique, tandis que la photo d'un pissenlit modeste peut véritablement toucher quelqu'un que je croyais jusque-là uniquement intéressé par les choses chères et exotiques. Mais cela ne signifie pas que j'utilise ces conclusions dans mon travail. Je me contente d'observer.


L'étude spatiale des fleurs
Au départ, ce qui me fascinait dans la photographie de fleurs, c'était leur exploration spatiale. Les fleurs sont complexes : elles sont colorées, texturées et spatiales. J'étais intrigué par les multiples formes que l'on retrouve dans un même objet lorsqu'on le tourne, le plie ou l'ouvre. De plus, une fleur change et se transforme chaque jour, et j'étais également attiré par cet aspect du changement. Aujourd'hui, la fleur est comme ça, demain elle est complètement différente, et après-demain, elle n'est plus là du tout. Si vous n'avez pas réussi à prendre une photo, votre chance est perdue ! C'est un moment perdu, une opportunité manquée.

Après avoir étudié la forme et la structure des fleurs, j'ai commencé à complexifier le processus en créant des compositions et en observant leur complémentarité. Ce processus d'étude est sans fin, et mon défi est de traduire en image tout ce que l'on peut observer chez les fleurs.

Une exploration incessante de la couleur
J'observe constamment la couleur, la lumière et leur relation. J'accorde une grande attention aux couleurs, tant dans la nature que dans les œuvres d'autrui. Je me pose constamment des questions, comme pourquoi une couleur ou une combinaison de couleurs m'attire et une autre non ? Ou encore, comment la couleur influence-t-elle la perception d'une œuvre, guide-t-elle le regard ou la pensée du spectateur, ou crée-t-elle une ambiance dans un environnement ? La nuance, la variété et la pureté des couleurs de la nature me fascinent profondément. Elles ne semblent jamais aléatoires ni en désaccord.

Le corps comme sculpture
Quand je photographie, je considère le corps comme un objet. L'être humain devient une sculpture que l'on peut tourner et transformer, et qui se meut de manière unique. Une grande partie de ce mouvement se concentre au niveau de la poitrine. Cette partie du corps est riche en os, en spatialité et en dimension, ce qui crée toujours une esthétique.

Bien que je sois portraitiste, je préfère travailler avec le corps. Photographier le visage humain est une grande responsabilité que je refuse parfois d'assumer. Cela implique une sorte de jeu psychologique entre le photographe, sa vision et la façon dont le sujet se voit ou veut se voir. De plus, le corps offre bien plus de possibilités d'expression. Le visage est contraignant ; il implique automatiquement un cadre de beauté ou de laideur.

Le jeune visage de la beauté
De nos jours, les canons de beauté évoluent et s'effondrent. Un profond bouleversement s'opère dans la mode comme dans la société. La résistance est palpable, chacun cherchant à présenter quelque chose de beau qui lui est propre. On dirait que nous en sommes venus à croire que la beauté réside dans l'unicité et la diversité. Il est difficile de photographier un visage trop beau. Difficile d'y découvrir quelque chose, de le représenter comme réel et vivant – il est tout simplement magnifique. Au final, cela devient presque une illustration. La beauté ne se trouve souvent que dans les nuances. L'expérience de la beauté est rare et suffisamment complexe. Je veux m'y attarder plus longtemps, car la première impression peut être suivie d'une autre. La beauté se révèle progressivement, et je veux lui laisser le temps de l'explorer en profondeur. Le beau peut aussi être moche.

Le voyage vers la transformation intérieure
Si nous voulons vivre une expérience authentique ou nouvelle, nous devons surmonter nos blocages, sortir de notre routine et de notre zone de confort. Nous devons parler à des inconnus, sortir dans la nature sans craindre de croiser des insectes ou des serpents… Pour moi, c'est un voyage que de se dépasser. Il y a une sorte de transformation intérieure à ce moment-là, une révélation. J'ai l'impression de pouvoir entrer en contact avec mon moi intérieur, ce que je ne peux pas ressentir autrement dans mon environnement habituel.

Les personnes que l'on rencontre comme force motrice dans la vie professionnelle
Mon style a été façonné par les personnes que j'ai rencontrées – des personnes qui ont fait irruption dans ma vie de manière inattendue et m'ont fait prendre conscience de ce dont je suis capable et de ce que je n'imaginais probablement pas. Ces personnes m'ont confié leurs idées et m'ont permis de les développer. J'aime aussi travailler en collaboration, cultivant mes propres idées avec les autres. Je travaille actuellement avec un mentor qui me guide vers la conscience de soi, tant dans ma vie professionnelle que privée. Il m'apprend à regarder mes propres réalisations avec objectivité. Les artistes et les professionnels fuient souvent l'auto-identification ; ils évitent de décrire leur travail et préfèrent le laisser parler par lui-même. Mais la capacité à s'exprimer est une force immense.

Sensualité dans les formes et les textures
Je qualifie mon travail de sensuel. Je trouve les textures sensuelles, les courbes et les ondulations variées qui évoquent des associations et des sentiments. Mais cette sensualité peut aussi être à peine perceptible. De même, je recherche une sensation tactile et sensorielle lorsque je photographie des fleurs et des objets. Visuellement, mon travail s'efforce de ressembler à une peinture, ce qui est en réalité une sensation subjective assez difficile à saisir.

Rubens et l'art sans frontières
Le peintre baroque flamand Pierre Paul Rubens m'a longtemps attiré dans le monde artistique. J'étais fasciné par l'interaction entre la nature et l'homme dans ses tableaux. Je suis attiré par l'art qui évoque des sensations quasi tactiles, et par les œuvres qui permettent d'observer une expérience plutôt qu'un objet ou un sujet spécifique. Je suis inspiré par la capacité des artistes à ne pas se limiter à un seul médium ; leur art ne connaît alors aucune frontière, et je crois que c'est ce qui explique cela !

L'inspiration est incessante
L'inspiration nous vient en permanence, il est donc important d'entraîner nos sens à la capter. L'inspiration est une information : visuelle, auditive, tactile. Elle est partout autour de nous et toujours disponible. Ce qui me fascine, cependant, c'est la façon dont les artistes qui ont découvert leur propre langage, leur propre style, leur propre sujet ou leur propre technique peuvent inspirer des générations, perdurer et devenir ainsi intemporels. Je crois que l'inspiration doit venir de la source la plus pure, la plus complexe et la plus authentique, car elle a alors une chance de se transformer en quelque chose de qualité. Sinon, elle s'affaiblit à chaque transformation.